Cancer, tu meurs !

Porté par l’insouciance des 20 ans, j’ai consommé la vie avec force cigarettes, alcool et fumette. A 32 ans, mon cancer à la langue m’avait déjà sacrément remué les méninges, avec un bout de langue en moins et une cicatrice discrète dans le cou. Quasiment onze ans après, un nouveau challenge se présente à moi aujourd’hui. Je suis sur le chemin, je vous raconte.

Par Yann KAPPES.

Mardi 2 juillet 2019. Une journée comme les autres me direz vous. Levé à 7h ce matin, après une nuit fraîche et reposante, à la même heure que les enfants.

Ancré pour la journée, je croise Ilyana vêtue d’un peignoir bleu ciel trop grand pour elle ; je vais voir Naël encore bien allongé dans son lit, une jambe repliée sur lui et la tétine vissée dans la bouche, je lui glisse un baiser sur le front et lui caresse la joue comme une invitation au réveil. Ses enfants, les fruits de l’amour que nous nous portons mutuellement avec leur mère. Comme hier soir, on a pris plaisir à le faire, l’amour. Que c’était bon !

Ce matin, Rachida prépare les goûters des enfants et le petit déjeuner. Les enfants vont à l’école, dernière semaine de l’année scolaire, avant de goûter aux joies de l’été et aux chaleurs du soleil. Ilyana croque un abricot en guise de petit déjeuner, tandis que Naël plonge sa paille dans son lait miellé de chèvre chaud. Brossage de dents, sandales et tennis aux pieds, sac sur le dos, je les amène à l’école Pierre Ravel , en route vers ses quartiers d’été.

Au moment de les déposer, j’éprouve un certain mal à contenir mon émotion. Je ne vais pas les (re)voir avant quelques semaines.

En fait, non ce n’est pas vraiment une journée ordinaire.

Avec Rachida, nous prenons le train en direction de la région parisienne. Villejuif plus exactement, où nous nous dirigeons vers l’Institut Gustave Roussy.

Fin mai, le Dr P. chirurgienne ORL au CHU Gabriel Montpied à Clermont-Ferrand a confirmé un cancer à la langue. Bis repetita onze ans après.

Je me suis cru débarrassé à vie de la maladie. Rémission, guérison, que nenni !

A l’abri de rien, jamais, c’est le charme fou de la vie qu’il nous faut tous accepter. J’ai baissé la garde. Comme en 2008 avant le diagnostic, je passe par toutes les émotions. La peur, peur de mourir, peur de souffrir, peur de ne plus voir et profiter de ceux que j’aime. Comme un lego, petit pièce de jeu sans vie, qu’on meut quand on veut. Notre condition humaine réduite à sa plus simple expression, petit être vivant sans prise avec ces cellules détournées malicieusement de leurs fonctions premières. Bashung dans les écouteurs, parti fauché par ce plus malin, je t’écoute à cœur ouvert. Bleu pétrole résonne en moi, comme un boomerang.

Je ne lâcherai rien !

Après les pensées mortifères, la force et le courage reprennent le dessus, j’aime la compétition. Quelque soit le diagnostic, il faudra se battre contre cette tumeur, la faire reculer et lui montrer qu’elle aura encore fort à faire pour me faire baisser la tête, mettre genou à terre. Dire Au revoir peut-être, certainement pas Adieu ! Je suis bien décidé à en découdre, avec toutes les armes en ma possession. Impératif de passer par la chirurgie, la reconstruction, la radiothérapie probablement. La méditation aussi, tout comme la psychologie positive, la bioénergie, le magnétisme. Ce qu’on ne voit pas à toute sa place pour se remettre d’aplomb. Le verre à moitié plein.

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Avec conviction, détermination, j’ai passé le mois de juin à établir le diagnostic de la maladie. Travail entre parenthèses, présence un jour, absence le lendemain. Au jour le jour, j’avance sur le chemin qui cernera l’étendue des dégâts… Scanner cervico-thoracique, écho-doopler artériel et veineux du cou et de la jambe, Pet-Scan, imagerie à résonance magnétique, prises de sang.

Multiplication des trajets. Aller-retours de Châtel-Guyon à Clermont-Ferrand, Riom, Paris, Villejuif, Thiais, La Houlette (Calvados). … J’ai décidé de mettre les meilleures chances de mon côté pour distancer le retour du cancer. Reprise en charge à l’IGR, en reprenant attache avec le Pr T. qui m’avait déjà opéré et suivi en 2008.

Il n’a pas traîné pour tracer mon chemin futur : opération, reconstruction, radiothérapie. Consulté le 31 mai, le comité m’a expliqué dans les grandes largeurs le déroulement de l’opération et ses conséquences. Pas de séquelles autres qu’une cicatrice de la lèvre jusqu’à mon cou. Pas de handicap, ni de problèmes d’élocution ou de mastication, sous réserve d’une bonne rééducation fonctionnelle. La radiothérapie attendra septembre.

En l’absence de métastase, le pronostic vital s’éclaircit. 70-80%… Chaque cas est unique, je ne suis pas plus un numéro que mon voisin de chambre. L’opération est lourde : ablation partielle de la tumeur nichée au fond de la bouche, entre les dernières molaires et la langue. Au contact de la mâchoire, elle menace d’y pénétrer pour continuer sa propagation maline. Le Pr B.-R. m’a expliqué une section de la mâchoire au niveau des molaires jusqu’à l’incisive, conduisant à une reconstruction à partir d’une partie du péroné prélevé dans la même intervention. Haute technologie. L’action des hommes dans ce qu’elle a de plus brillant de précision pour préserver la vie. L’homme avant tout. La finance après… Quoique…

Sérénité comme l’état d’esprit que j’ai en ce matin de J-1. Ma femme m’accompagne dans cet aller, retour imprévu bien qu’estimé dans un mois.

Cœur léger et serein, opération lourde et vitale. Je redoute d’ores et déjà le réveil en réanimation. Une trachéotomie plantée dans la base de la gorge pour respirer malgré l’occlusion des voies supérieures. Une sonde nasale pour nourrir ce corps coupé, rapiécé, suturé. Le corps humain est une machine aussi géniale que redoutable. J-1, je me dois de lâcher-prise le temps de cette chirurgie sans commune mesure avec ce que j’ai connu à présent. On approche de la gare de Paris Bercy, synonyme d’attache pour le mois.

J’ai de la chance dans mon malheur. Ma famille, ma femme, mes enfants, mon frère, mes « frères »… Encore une expérience pour s’élever encore plus haut, plus grand. Grâce à la méditation, au retour sur mon intérieur, j’ai appris à me centrer sur l’ici et maintenant. Le bonheur est en soi, non dans l’extérieur, d’où l’intérêt de revenir vers soi-même. L’indicible mérite davantage d’attention. Rachida m’a ouvert sur de nouvelles pratiques thérapeutiques, notamment la bioénergie, le magnétisme. J’ai aussi pris conscience que je suis un être bien plus spirituel que matériel, où l’énergie en nous peut retourner des situations incroyables. NDE, décorporation, électro-magnétisme, chamanisme…

Autant d’expériences raillées, méprisées qui suggèrent l’étendue impensable de nos capacités. Je médite donc je suis. Jacques L., magnétiseur normand, m’a scanné et a vu de jolies couleurs et a travaillé énergétiquement à réduire ma tumeur. Ces outils vont bien m’aider à me retaper, j’en suis sûr.

Rebelote, pourquoi ? Prédisposition génétique ? Aucun membre de ma famille n’a eu ce cancer. Hypothèse écartée. Le Pr T. évoque une fragilité de la langue. Frottements excessifs ? Le Dr S. n’a jugé bon de donner suite à la petite tâche blanche tapie au fond de la bouche. Comment lui en vouloir ? Seul compte le présent. La polémique n’est pas vraiment constructive en l’occurrence. L’origine spirituelle de mon cancer ? Il serait intéressant de faire un rapprochement entre les événements phares de mon passé familial avec les émotions vécues qui ont jalonné mon histoire.

Pourquoi cet article ?

Enfin, pourquoi j’écris cet article ? Certainement pas par voyeurisme. Je l’écris, je ne le publierai pas. Rachida fera ce qui lui semblera bon d’en faire. Elle m’a demandé de mettre noir sur blanc mes émotions, ce que j’ai sur le cœur, comme un exutoire à ce que j’ai fourré dans la tête, que je ne dis pas par pudeur, peur de saouler, orgueil ou retour de bâtons… A son invite, je vous écris bien assis à la place n°15 de la voiture 7 de l’Intercités 5966.

J’écris simplement pour vous rappeler que la santé est ce que nous avons de plus précieux en ce monde physique.

Pour mes enfants que j’aime maladivement, que j’aime plus que tout ici bas en dépit de leurs chamailleries fraternelles, pour continuer à jouir d’eux. Pour ma femme, que j’aime profondément et que j’ai toujours autant de plaisir de suivre dans ces apprentissages, Dieu qu’elle m’a fait grandir et m’élever, il est loin le Yann à 20 ans… Parce que ma petite nièce montre tous les jours la voie du combat, l’amour de la vie. Parce que j’entends bien revenir plus fort , rempli de l’envie de profiter des belles choses qui font la beauté de la vie. La nature, les enfants, l’amour, le partage, les sourires, les repas, être avec toi…

Puisse cet  écrit inspirer d’autres malades à regarder droit devant, s’accrocher à ce qu’ils ont et à la chance d’en jouir, donner de l’amour, garder le sourire et s’efforcer de penser au meilleur, même dans la tempête et la galère. Bel été à toutes et à tous, savourez avec délice et bonheur les bonnes choses qui pimentent l’existence. Bref, vivez !!

6 réflexions au sujet de “Cancer, tu meurs !”

  1. Bonjour, ton article, Yann, me touche beaucoup. J’ai eu moi-même un cancer jeune et je suis le premier cas dans ma famille. Je te souhaite bon courage sur ton chemin et j’espère que les pratiques issues de la médecine douce t’aideront à récupérer. Toutes mes pensées sont avec toi, Rachida et tes enfants

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  2. bonsoir Rachida et Yann,

    Très touchée par les lignes qui précèdent et me font penser à Blandine, soeur de mon amie d’enfance Brigitte qui est dans ce même ‘circuit’ (j’ évite le mot ‘combat ‘)elle vit dans les Vosges et gagne chaque étape…Je pense aussi à Jean-Jacques Trochon, pilote Air France, qui soutien une recherche IGR avec Natura4ever dont il est l’ambassadeur : il raconte combien la spiruline a été une aide extraordinaire dans son parcours VERS la santé (avec récidives) …et il pilote les A380 !(il témoigne sur youtube)je ne sais si ces quelques mots vous apporteront les encouragements, le soutien, l’ amitié ressentie …JE vous adresse plein de tendresse, moi, une des mamies du web !Martine 0641862221

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  3. Bonjour Rachida et bonjour Yann,
    Quel message! Un message chargé de sincérité, de combativité et d’amour.
    Je vous souhaite beaucoup de courage pour traverser cette épreuve et je vous envoie ma force et des ondes positives par wagons pour vous soutenir dans ce combat contre la maladie. De tout coeur avec vous. Et une pensée pour Norine qui est une warrior exemplaire.

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  4. Merci Yann pour ton témoignage
    Je suis tellement inspiré par ta détermination à faire face à un monstre.
    Je t’envoie toute l’énergie nécessaire.
    Vous êtes la preuve que Rachida et toi que l’amour est capable de tout surmonter.
    Que Vive votre exemple !
    Grosses pensées et souhaits de Bonheur

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