J’ai assisté il y a quelques jours à une conférence passionnante du Docteur Anthony Fardet, chargé de recherche en nutrition à l’INRA de Clermont-Ferrand. Le Docteur Anthony Fardet est l’un des premiers à avoir introduit la notion de « produits ultra-transformés » en Europe en 2014. Voici quelques points qu’il a abordés et que je souhaite partager avec vous à travers cet article.
Si nous vivons en moyenne 85 ans pour les femmes, et 79 ans pour les hommes, en revanche nous vivons de moins en moins longtemps en bonne santé (64 ans pour les femmes, 62 ans pour les hommes).
En résumé, l’arrivée à la retraite est malheureusement souvent accompagnée de l’apparition de maladies chroniques, et nous vivons par conséquent en moyenne de 17 à 21 ans malades !
Comment pallier au manque d’éducation nutritionnelle ?
Il m’arrive souvent d’observer les caddies au supermarché et de constater les « drames » alimentaires qui se passent sous nos yeux.
On est parfois face à un manque total d’éducation nutritionnelle que le gouvernement essaie de corriger avec la mise en place du système Nutri-score.
Conçu par la Santé publique en France, à la demande de la Direction générale de la santé, ce logo placé sur les emballages permettrait d’indiquer aux consommateurs si le produit est sain au niveau nutritionnel, ou alors à éviter.
Peut-être un premier pas vers la sensibilisation à l’éducation nutritionnelle dans les supermarchés ?
La mauvaise alimentation, première cause de décès
Dans les pays développés, les premières causes de décès sont attribuées aux maladies cardiovasculaires, aux accidents vasculaires cérébraux (AVC) ou encore aux cancers et autres démences. (Source OMS)
Or, on sait aujourd’hui que les populations les plus malades sont celles qui consomment le plus de produits très transformés.
De plus, celles qui consomment le plus de ces produits, ont un risque de surpoids ou d’obésité augmenté de 26%. En France, un adulte sur deux est en surpoids, et 16% sont obèses.
Les scientifiques s’attellent à comprendre les impacts de notre alimentation sur notre santé et comment elle peut être rééquilibrée pour prévenir l’apparition de ces maladies chroniques et nous permettre de vivre le plus longtemps possible en bonne santé.
L’industrie agro-alimentaire ne nous veut pas toujours du bien !
Le travail, les enfants, les courses, le temps passé sur les réseaux sociaux, les loisirs, le sport… Nous manquons de plus en plus de temps, et les industriels de l’agro-alimentaire l’ont bien compris. Ils nous proposent de plus en plus de produits faciles à préparer, rapides à utiliser, à consommer sur le pouce.
Souvent trop salés, trop sucrés, ces produits ont été soigneusement conçus, testés pour que les personnes aient envie de les consommer à nouveau, car très additifs.
Le marketing vient en plus en rajouter une couche. De belles boites colorées qui donnent l’impression d’acheter des produits sains, des termes racoleurs comme le « sans huile de palme », ou encore une nana à la télé qui est devenue resplendissante et avec un ventre plat depuis qu’elle mange certains yaourts !
Nos enfants sont les premières victimes de ce marketing. On les attire avec de jolis petits personnages musclés, des princesses, des princes charmants, des supers héros ou encore les héros de dessins animés du moment. A nous adultes, de les protéger !
Qui n’a pas déjà eu à gérer la crise de son enfant au supermarché, parce qu’il voulait la boite avec le monstre rigolo rose fluo dessus, ou un fromage en ficelle plutôt qu’un bon Saint Nectaire au lait fermier ?
Les aliments ultra-transformés nuisent à notre santé
Contrairement aux aliments pas ou peu transformés, les aliments ultra-transformés ont subi de nombreux processus industriels. Par conséquent, nous ne sommes plus capables de reconnaître visuellement ou même au goût, l’origine naturelle des ingrédients qui les composent.
Ils ont subi en général plusieurs étapes de transformation, et sont composés d’ingrédients eux-mêmes déjà modifiés ! Par exemple, un biscuit est composé de sucre et de farine blanche raffinés. Ou encore, il est difficile d’identifier les ingrédients naturels de base qui ont permis de faire une barre chocolatée ou un soda.
Ces aliments sont complètement nouveaux pour notre corps, puisqu’ils n’ont envahi les rayons des supermarchés que depuis une quarantaine d’années !
8 bonnes raisons de réduire les aliments ultra-transformés
Jusqu’à présent, il nous est conseillé de manger moins gras et moins sucrés (et bouger plus). Mais il est temps de changer de paradigme, car il faudrait conseiller de manger moins « ultra-transformés ».
Ces produits doivent être éviter au maximum pour plusieurs raisons.
1- Ils sont beaucoup trop sucrés.
Même des produits à la base salés, comme certaines sauces, soupes, contiennent du sucre ajouté ! Ces produits sont très peu rassasiants, et ont en général un index glycémique élevé. C’est à dire qu’ils provoquent une augmentation du taux de sucre dans le sang (glycémie) et des pics d’insuline, l’hormone qui a pour fonction de rétablir une glycémie normale.
De plus, les importantes quantités de sucre qu’ils contiennent, les rendent addictifs !
Ils sont vraisemblablement responsables de l’apparition de maladies comme l’obésité et le diabète de type 2, véritable fléau dans les pays développés.
On estime d’ailleurs qu’en 2025, il y aura 300 millions de diabétiques de type 2 dans le monde.
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2- Ils sont trop salés.
Le sel vient souvent camoufler la pauvre qualité gustative des aliments. Même si il n’est pas tout à fait un exhausteur de goût, il permet de modifier la perception de celui-ci. Le sel est du chlorure de sodium dont les effets néfastes sur la santé sont bien connus. Il joue un rôle important dans l’hypertension, un facteur des facteurs de déclenchement des maladies cardiovasculaires.
3- Ils ont peu de bénéfices nutritionnels.
Les processus de transformation vont en effet dénaturer les ingrédients. Par exemple, la cuisson va détruire certaines vitamines ou micronutriments antioxydants. Ces aliments sont sans vie. Ils ne pourrissent jamais et sont conservés depuis souvent très longtemps.
4- Ils contiennent des composés non naturels ou additifs,
comme certains arômes, conservateurs, émulsifiants ou colorants. Certaines études montrent même un lien entre l’hyperactivité chez l’enfant et certains colorants utilisés dans l’industrie agro-alimentaire.
5- Ils contiennent trop d’acides gras saturés
comme l’acide palmitique issu de l’huile de palme. Des chercheurs ont démontré que ce type d’acides gras favorisent le développement de cancer et des métastases.
Je pense par exemple ici à une célèbre pâte à tartiner addictive, d’un célèbre industriel et qui plus est, utilise environ 185 000 tonnes d’huile de palme par an, car elle est bon marché !! Un véritable drame écologique en plus du drame de santé publique !
6- Ils contiennent des acides gras trans.
Ces acides gras sont aussi associés au risque accru de développer des maladies cardiovasculaires ou le cancer du sein. Ils favorisent l’augmentation du mauvais cholestérol, les fameux LDL.
Ils apparaissent suite à la transformation chimique, appelée hydrogénation ou lors du chauffage et de la cuisson des huiles végétales.
7- Les procédés industriels font apparaître des composés mauvais pour notre santé.
L’acrylamide est un composé potentiellement cancérigène et neurotoxique qui se forme lors de la cuisson de produits riches en amidon et en asparagine (un acide aminé).
Parmi les aliments les plus riches en acrylamide, il y a les frites, le café noir, les biscuits sucrés (souvent consommés par nos enfants !!)… Plus le produit brunit, plus il contient d’acrylamide. Éviter donc de trop faire frire les aliments ou de griller trop longtemps les tartines de pain.
Le fumage fait apparaître des d’hydrocarbures polycycliques aromatiques (HAP) également nocifs pour notre santé dont certains sont cancérigènes.
Dans l’huile de palme chauffée à plus de 200°C, il apparaît des composés potentiellement cancérigènes et génotoxiques comme les esters d’acide gras glycidique.
8 – Ils perturbent le bon équilibre de notre flore intestinale.
Les milliards de bactéries que nous avons dans notre tube digestif sont essentielles à notre santé physique mais même mentale.
Des études montrent que consommer trop de produits contenant des additifs perturbent non seulement notre digestion mais, pourraient favoriser le développement de troubles mentaux. Les scientifiques suspectent de plus en plus l’impact de ce type d’alimentation sur nos bonnes bactéries, qui produisent des molécules qui agissent sur notre cerveau.
La perturbation des bonnes bactéries est également à des troubles comme l’obésité et d’autres maladies chroniques…
Exemple d’aliments ultra-transformés à éviter
Barres chocolatées, confiseries, gâteaux, crèmes glacées, céréales du petits déjeuner, viennoiseries, sodas, boissons énergisantes, jus sucrés, sirops, produits laitiers sucrés, saucisses, nuggets de poulet ou de poisson, poisson pané, certains plats prêts à consommer, soupes en sachet, nouilles instantanées, snacks emballés, sauces et vinaigrette, chips…
8 règles d’or pour bien manger
Une alimentation saine et équilibrée permet de prévenir le surpoids et de nombreuses maladies chroniques comme le diabète, l’obésité, les maladies cardiovasculaires ou encore certains cancers.
Elle va également ralentir la fonte musculaire ou même l’ostéoporose (fragilisation des os).
Les populations qui consomment le plus de produits végétaux et peu transformés ont moins de maladies comme le diabète de type 2.
Citons par exemple les populations ayant un régime méditerranéen ou encore les habitants d’Okinawa, une petite île au sud du Japon qui comptent un nombre record de centenaires en bonne santé.
Voici 8 règles d’or pour bien manger et préserver au mieux sa santé au top le plus longtemps possible.
1- Privilégier des produits pas ou peu transformés
et réduire les produits ultra-transformés dont nous venons de parler.
- Les aliments non transformés sont consommés sans aucune modification après les avoir ramassés, cultivés, comme les fruits et légumes, les œufs par exemple.
- Les aliments peu transformés ont subi peu de processus de transformation et aucun ajout. Ils peuvent être lavés, triés, fractionnés, broyés, séchés, fermentés…
- Les aliments culinaires transformés sont obtenus par des procédés comme le pressage, le broyage ou encore le raffinage. Les huiles végétales, le beurre (une graisse animale) ont font partie.
2- Privilégier les protéines végétales, réduire les protéines animales.
Les légumineuses, par exemple, (lentilles, pois, pois chiches, fèves, haricots) sont des légumes secs riches au niveau nutritionnel. Ils sont d’excellents sources de fibres, de protéines végétales et autres nutriments très bénéfiques à notre santé. De plus, ils sont très rassasiants.
Ils ont malheureusement été délaissé de nos jours ; les plus pauvres en consommaient bien davantage par le passé.
Il faut de préférence faire tremper les légumineuses toute une nuit pour éliminer au maximum, une molécule qui bloque les nutriments appelé l’acide phytique. Cette molécule a l’inconvénient d’empêcher l’assimilation de certains nutriments et peut par conséquent provoquer des carences alimentaires.
Découvrez la recette libanaise du Houmos, un mezzé fait à base de pois chiche.
3- Manger diversifié, local, de saison et bio si possible.
Les fruits et légumes bios sont en effet plus riches en antioxydants et ne contiennent pas ou très peu de pesticide !
4- Bien s’hydrater
en consommant de l’eau et du thé vert, excellente source d’antioxydants.
5- Consommer de bonnes graisses afin de rééquilibrer le ratio omega-6 / omega-3.
Les régimes occidentaux nous apportent beaucoup trop d’oméga-6 et pas suffisamment d’oméga-3. Nos ancêtres consommaient quasiment autant d’oméga-6 que d’oméga-3. Aujourd’hui, nous ingurgitons de 15 à 20 fois plus d’oméga-6 que d’oméga-3.
Les huiles végétales de lin, d’inca inchi, de cameline, les graines de chia sont d’excellentes sources en oméga 3.
ATTENTION : Ces huiles sont assez instables, il faut qu’elles soient extraites à froid. Elle doivent être consommées assez vite et conservées au frigo.
Pour connaître les aliments riches en oméga-3, cliquez ici et téléchargez le guide « Comment booster naturellement son microbiome ? ».
6- Prendre le temps de bien mâcher
pour stimuler les productions des hormones de satiété. Citons par exemple la leptine, une hormone produite par nos cellules graisseuses et qui agit au niveau de notre cerveau afin de réduire l’appétit. La mastication va permettre de manger ce dont le corps a vraiment besoin et de ne pas exploser le compteur des calories.
7- Manger en pleine conscience
afin de se reconnecter à sa faim, en mangeant au calme et non pas devant un écran. En prenant aussi le temps d’apprécier chaque bouchée, de s’écouter et de dire stop aux coups de fourchette en trop !
8- Se prévoir un menu de triche ou « cheatmeal »
une fois par semaine. Il faut aussi « se faire plaisir » de temps en temps afin d’éviter toute frustration. Si on mange sainement toute la semaine, on sait que lors de la journée spéciale « cheatmeal », on pourra se permettre les petits écarts qui nous font envie !
Références
Fardet A. Minimally processed foods are more satiating and less hyperglycemic than ultra-processed foods: a preliminary study with 98 ready-to-eat foods. Food Funct. 2016 May 18;7(5):2338-46.
Mangiola F, Ianiro G, Franceschi F, Fagiuoli S, Gasbarrini G, Gasbarrini A. Gut microbiota in autism and mood disorders. World J Gastroenterol. 2016 Jan 7;22(1):361-8.
Morio B, Fardet A, Legrand P, Lecerf JM. Involvement of dietary saturated fats, from all sources or of dairy origin only, in insulin resistance and type 2 diabetes. Nutr Rev. 2016 Jan;74(1):33-47.
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Pallister T, Spector TD. Food: a new form of personalised (gut microbiome) medicine for chronic diseases? J R Soc Med. 2016 Sep;109(9):331-6.
Willcox DC, Scapagnini G, Willcox BJ. Healthy aging diets other than the Mediterranean: a focus on the Okinawan diet. Mech Ageing Dev. 2014 Mar-Apr;136-137:148-62.
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